lundi 6 novembre 2023

La discothèque idéale (version mixte); un work in progress



Aujourd'hui, le format dominant de consommation de la musique est une question en suspens. Les applications de musique comme Spotify, Bandcamp (RIP?), YouTube/YouTube Music ou autres ont presque définitivement cassé le modèle de «l'album», introduit dès le début des années 1940 et dominant le marché depuis au moins les années 1950. Il faut dire que le CD avait déjà percé une bonne brèche avec des programmes de rééditions ambitieux et d'anthologies historiques se multipliant dans les années 1990 et 2000 (pensons à toutes les versions avec pièces «bonus», albums 2-sur-1 ou encore repackagings mettant en vedette des musiciens parfois obscurs). Mais depuis une vingtaine d'années, le retour en force du format vinyle, de plus en plus identifié comme produit de luxe à destination d'un public plus jeune, urbain et parfois un peu m'as-tu-vu (aux USA, 50% des consommateurs de disques vinyles... ne possèdent pas de table tournante!) doit aussi être pris en compte, puisque le format domine aujourd'hui en grande partie l'activité des rééditions et des parutions historiques autant que des nouvelles sorties - quoique certains labels semblent maintenant, en période de forte inflation, considérer de plus en plus les coûts beaucoup moindres de la production d'un album en format compact (pensons à la différence de prix considérable entre l'édition vinyle d'un album de près de 80 minutes, qui nécessite deux disques, et le CD simple qui contient autant de musique...). 


Mais pour qui connaît l'histoire du jazz, cette crise du format n'est pas nouvelle; le passage à l'album 33-tours longue-durée au début des années 1950 avait déjà causé une révolution pour toute une génération habituée aux miniatures de 3 minutes qui étaient la norme à l'époque du 78-tours (on se souviendra des critiques très dures contre Duke Ellington lorsqu'il tente de s'affranchir de ce format avec la composition de ses suites format long, comme Reminiscing in Tempo ou Black, Brown and Beige, alors qu'on ignorait assez largement les triomphes que sont des oeuvres comme le Mood Indigo de 1950 ou le Tone Parallel to Harlem de 1951). Mais il est vrai que la dématérialisation de la musique pose des questions nouvelles: alors que la culture des blogues du tournant des années 2010 tendait à déterrer des trésors et à revaloriser des albums souvent peu distribués, les algorithmes contemporains peuvent laisser des pans entiers de la culture musicale dans l'ombre, malgré le travail acharné de certains thuriféraires mettant de l'avant des catégories au contours parfois flous et confus (on pense au «jazz spirituel» ou à toute cette musique dite «ambiante», deux catégories qui intersectent d'ailleurs souvent...). 


Donc l'album n'est pas encore tout à fait mort; est-il le dernier sursaut d'une industrie en constant déclin, elle-même symptôme du capitalisme tardif? Marx lui-même ne ferait sans doute pas de pronostic... Toujours est-il que l'amateur, l'archiviste et/ou le collectionneur en herbe pourront se retrouver perdus dans la prolifération des formats, des éditions plus ou moins officielles et les diverses compilations qui se retrouvent maintenant sur les différentes plateformes. Ma discothèque idéale a été conçue avec cette idée en tête, et les textes d'accompagnement des différentes fiches essaieront de faire un panorama des différentes éditions et albums associés aux musiciens que j'ai choisis; par ailleurs, ces choix ont été faits avec une volonté de représentativité des styles, époques et musiciens importants, novateurs (célèbres ou non) tout au long de l'histoire du jazz. J'ai tenté de découper le tout de façon à peu près égale - il est inévitable que certaines époques particulièrement prolifiques soient plus représentées mais j'ai aussi essayé de présenter tous les styles (même ceux desquels je suis le plus éloigné esthétiquement) et de représenter chaque musicien majeur, cherchant au moins un album intéressant pour chacun, sans que ce soit nécessairement un album le plus représentatif. Mon premier choix apparaît toujours en premier, avec des substitutions possibles ensuite selon les formats. 

Découvrez les différentes époques de l'histoire du jazz en cliquant sur les catégories ci-dessous: 












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